dimanche 4 janvier 2009

Le compagnon d'une institutrice écrit à M, Darkos…

La voici :

Monsieur le Ministre de l’Education Nationale, Monsieur le Recteur d’académie, Mr l’inspecteur d’Académie.

Je vous remercie des condoléances  dont vous m’avez  fait part après le suicide de ma femme Muriel, institutrice spécialisée, qui s’est donné la mort dans l’après midi du 6 octobre dernier au groupe scolaire

Gambetta de Massy, son lieu de travail.

Je prends le temps de vous répondre, passé le premier choc, pour attirer cependant votre attention sur plusieurs faits qui dans ces circonstances douloureuses ont témoigné de bien peu d’empathie, et de

respect des personnes.

Le corps de ma femme n’était pas encore au funérarium, que l’Inspecteur d’Académie convoquait dans les locaux du groupe scolaire une réunion des enseignants, auxquels il enjoignait de n’évoquer “que

des problèmes personnels”, face aux questions que ne manquerait pas de susciter un tel événement.

Dès le lendemain, 7 octobre,  le Recteur d’Académie divulguait une information du dossier médical de ma femme censé être confidentiel,

trahissant ainsi le secret professionnel, au journal de 13h de France 2 et sur RTL le même jour.

À cette entorse grave au secret professionnel, s’ajoutaient des informations totalement inexactes qui tendaient de manière allusive à faire passer ma femme pour une dépressive chronique. Ainsi, la moitié

de son temps d’arrêt maladie en 2007 n’était pas dû à la dépression mais

à une cause médicale bien distincte.

Suite à cet arrêt de travail, ma femme a repris son poste en décembre 2007 juste avant les vacances de Noël., et non à la rentrée 2008 comme l’a affirmé publiquement sa hiérarchie.

Ces mêmes interventions publiques et largement médiatisées ont en revanche bien peu fait mention de la compétence et de la qualité du travail de ma femme, reconnues et saluées tant par ses collègues que

par les parents d’élèves. Muriel était une femme passionnée par son travail, animée du souci

permanent de bien faire et d’une grande exigence professionnelle.

Outre sa formation de professeur des écoles et sa formation de rééducatrice,

elle avait fait deux années d’études supérieures en lettres (hypôkhagne et khagne,) puis obtenu sa licence de Lettres en Sorbonne. C’est dire que son engagement auprès des enfants dans le cadre des Réseaux d’Aide Spécialisé aux Eléves en Difficulté était un choix personnel qui correspondait à une motivation profonde.

Je peux témoigner, comme tout son entourage, qu’elle souffrait du manque de reconnaissance dont  pâtit particulièrement cette catégorie d’enseignants, et qu’elle évoquait souvent, la semaine précédente,

l’intention annoncée de supprimer des postes et de modifier profondément le fonctionnement du RASED comme une source d’angoisse pour elle. Que cette intention, enfin, allait totalement à  l’encontre du

développement de son travail en direction des enfants en difficultés.

Personne ne saura ce qui a pu déclencher son acte de désespoir. Mais la façon expéditive et réductrice qui a été utilisée pour parler de son acte n’a rien à voir avec le respect de la vérité ni de sa personne.

Enfin, si le souci de filtrer l’information semble avoir été primordial pour sa hiérarchie, pourquoi les détails de sa mort ont-ils été divulgués sur les ondes  à des heures de grande écoute, sans tenir compte des conséquences possibles pour mes enfants?

Cet ensemble de considérations m’amène à souhaiter le rétablissement public d’une certaine équité dans la présentation de cette affaire, aussi ma réponse prendra-t-elle la forme d’une lettre ouverte adressé

à la presse.  Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, Messieurs, l’expression de ma haute considération .


Patrick Carpentier

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